
Interview d'Anaïs Carayon, Brain-Matin.fr
Entretien inédit avec la fondatrice du magazine Brain fondé en 2007. Tout savoir sur ce média devenu depuis le 1er décembre 2020 "Brain Matin", une newsletter payante au ton désopilant qui fait la part belle à la politique.
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Quel était l’élément déclencheur à la restructuration de Brain ?
Un combo de très grande lassitude envers Facebook, qui nous bloque ou shadowban régulièrement, et un besoin impérieux d’enfourcher le tigre comme nous l’a conseillé notre cher Président. Plus sérieusement, la crise sanitaire et économique a précipité une envie de modifier notre façon de fonctionner, pour une - encore - plus grande indépendance.
C’était quoi la principale difficulté pour mener à bien cette conduite du changement ?
Penser à une stratégie globale cohérente : inventer un modèle très peu usité encore en France (la newsletter payante), réfléchir à une direction artistique graphique, éditoriale et un plan de com'.
Avez-vous songé à tout arrêter et à vendre Brain pour un autre projet par exemple ?
Oui, souvent, pour partir ouvrir un bar au soleil. On a eu un bar Brain rue Oberkampf à Paris, qui était destiné à être éphémère pendant 9 mois, on aura peut être un jour un Brain non éphémère, et sous le soleil. Ou peut être à Paris d’ailleurs, qui sait ? (c’est un projet... mais chut ! c’est secret).
Est-ce que la newsletter payante Brain Matin marque la fin d’une époque ?
Je le pense oui. Et cette fin d’une époque est intimement liée à la crise de la presse, et notamment d’un rapport de plus en plus biaisé avec les annonceurs et les réseaux sociaux. Mais cette fin d’époque est déjà là depuis plusieurs années, la crise que l’on traverse la rend juste subitement beaucoup plus flagrante.
Avec cette nouvelle offre, est-ce que Brain est devenu moins « cool » ?
J’ai de plus en plus de cheveux blancs, est-ce que ça me rend moins cool ? La question, elle est vite répondue comme dirait ce jeune entrepreneur. Plus sérieusement, bis, clairement ce nouveau Brain vise un lectorat qui aime avant tout lire, cool ou pas cool. Et parler de politique sérieusement va forcément attirer un nouveau lectorat, du moins je l’espère.
En quoi le canal e-mail permet-il une émancipation ?
Cela nous permet d’avoir des revenus fixes, et donc forcément une plus grande stabilité et une dépendance moindre à la publicité. On continue par ailleurs d’être producteur de contenus (podcasts et events - quand on pourra en refaire inch’Covid-19).
Sur quel.s critère.s avez-vous fixé le prix d’abonnement ?
On se disait que 5 euros était un palier symbolique à ne pas dépasser. Donc 4 euros c’est bien. Et que c’est le prix de deux Camemberts Cœur de Lion et ce disque de Patrick Sébastien... Un signe donc.
Quelle stratégie marketing avez-vous mise en place pour le lancement ?
Publication d’un gros communiqué et grande campagne vidéo avec une quinzaine de célébrités qui disent du mal de Brain (quelques exemples : Guillaume Meurice, Marina Rollman, ou Camelia Jordana). Pour l’instant, tout a été organique, nous réfléchirons à du marketing plus tard. On doit aussi lancer un Club Brain, avec des événements privés et exclusifs pour nos abonnés, lorsque la situation sanitaire nous le permettra.
Sur l'ancien site, il y avait déjà un champ d’inscription, était-il exploité et vous a-t-il permis de constituer une base ?
Oui, il était exploité. Nous avons 40.000 membres, à qui nous avons d’ailleurs envoyé les infos sur ce lancement de Brain Matin bien sûr !
Combien d’abonnés aviez-vous en pré-lancement et combien aujourd’hui ?
Nous avions 500 abonnés pour le lancement de la première newsletter quotidienne. Après deux semaines, nous sommes à 1.500 abonnés. C’est très bien pour un début, mais on souhaiterait en avoir 3.000 rapidement.
Comment expliquez-vous un tel succès et notamment l’adhésion de votre cible à ce nouveau modèle ?
Je pense que nous avons un ton particulier, auquel les gens adhèrent ou non, et donc ceux qui adhèrent, et qui aiment vraiment lire la presse et qui ont les moyens de payer 4 euros, nous suivent. Par contre, je ne sais pas si c’est un succès, je ne le vois pas comme ça, je vois surtout tout ce qui reste à accomplir.
Quel est le taux d’ouverture ?
On a commencé à 90%, on est à 80%.
Quelle est votre solution technique ?
On utilise Campaign Monitor pour le design et le routage, et Memberful pour la gestion des comptes membres et l'abonnement.
Vos objectifs sont-ils atteints ?
Sur le plan éditorial, nous allons continuer à proposer de nouveaux formats et présenter de nouvelles plumes, ce qui a fait le succès de Brain depuis ses débuts. Notre service politique travaille par ailleurs sur des enquêtes. Quant au plan comptable, nous avons encore plusieurs mois pour y arriver tranquillement.
Certains contenus sont partageables in extenso sur Twitter et Facebook, est-ce que cela n’entre pas en conflit avec votre modèle ?
Non, la publicité c’est toujours de la bonne publicité, si les gens se partagent Brain Matin tant mieux, ça leur donnera peut être l’envie de s’abonner.
Avez-vous déjà d'autres projets d’évolution ?
Oui, à terme, j’aimerais pouvoir créer un compte Brain avec accès à tous les Brain Matin en archives, et peut être rouvrir une page "Pute", scrollable à l’infini, comme avant. Et pouvoir refaire Brain en version papier, mais ça c’est une autre histoire.
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Publié le 18-12-2020
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